Howlin’ Jaws
Deux ans après Strange Effect, le groupe parisien revient le 29 septembre 2023 avec Half Asleep Half Awake, un deuxième album qui vous redonnera foi dans le rock. Comment ? Avec un condensé de tubes surpuissants, de mélodies lumineuses et de jams démoniaques qui brûlent les doigts.
On vous voit déjà froncer des sourcils, du genre : « un disque de rock’n’roll en 2023 ? » Mais laissez-nous faire les présentations. Howlin’ Jaws est un trio composé par Djivan Abkarian (chant, basse), Lucas Humbert (guitare) et Baptiste Leon (batterie) qui s’est formé à l’école primaire avant de s’étoffer au collège pour prendre son envol au lycée. Les garçons fans de musiques fifties et sixties (Cochran, Small Faces, Beatles, Kinks, Slade, etc.) sont alors lancés sur l’autoroute rock. Ils sortent un premier album intitulé Strange Effect en 2021 bourré de moments flamboyants et de riffs aiguisés qui câlinent l’oreille. Mais nous ne sommes pas là pour parler du passé.
Le présent s’appelle Half Asleep Half Awake. Pour ce deuxième album, les Parisiens sont retournés à Londres au Toe Rag Studios créé par Liam Watson, un ingénieur de génie qui a produit l’album Elephant des White Stripes et bossé avec Madness, Tame Impala ou encore Supergrass. Là-bas, ils ont eu envie de troquer l’efficacité pour la spontanéité. L’idée : remplacer les riffs trop parfaits par des successions de phases psychédéliques et de signatures rythmiques fracassantes. Cette nouvelle manière de procéder, qui découle notamment de leur expérience en tant que backing-band d’une troupe théâtrale où le groupe devait improviser des longs jams de folie – pour la pièce “multi Molièrisée” Électre des Bas-Fonds – s’est logiquement frayée un chemin jusqu’à l’album.
En fait, Half Asleep Half Awake est un enchaînement façon gymnaste professionnel de tubes taille XXL. Il y a des balades madeleine de Proust (The Sting, Mindreader), de l’hystérie (Mirror Mirror, Half Asleep Half Awake), un home-run remarquable (See You There) et des diamants de 18 carats (Blue Day, Bewitched Me). Pour renforcer ce côté kaléidoscopique, les Howlin’ Jaws ont incorporé des nouveaux instruments (un djura, sorte de mini bouzouki grec ; des sagattes, des petites cymbales utilisées en Égypte et en Turquie) afin d’ajouter de l’épaisseur et apporter de la diversité. Résultat : les guitares sur Mirror Mirror sonnent comme des sitars. Les voix ont été doublées puis passées dans des cabines Leslie afin d’apporter un effet vibrato. Et les solos de batterie et de guitares sont infusés de phaser – un effet de modulation du son. « Il y a deux ans, on ne pensait pas qu’on allait autant expérimenter et incorporer tant d’effets dans notre musique. Mais maintenant, ça nous paraît évident de les utiliser pour étoffer le spectre sonore », racontent les trois garçons. Pour de nombreux groupes, on parle du deuxième album comme celui de la maturité. Pour Howlin’ Jaws, c’est déjà celui de la consécration.
L’esthétique globale de Half Asleep Half Awake (la pochette réalisée par une IA ou les sonorités) accompagne parfaitement les thématiques évoquées. Les nouvelles chansons font allusion au rêve, à la voyance, à l’incantation, au mystique. Finalement, ce deuxième disque sonne déjà comme leur Sgt. Pepper. Un album où l’alchimie et les expérimentations donnent naissance à la frénésie, à la sauvagerie et à l’émotion. À écouter à moitié endormi ou réveillé, comme vous voulez.